Le Parisien du 28 Février 2018 : La Frette et le Plessis-Bouchard bien remontés contre la loi SRU
La Frette et le Plessis-Bouchard bien remontés contre la loi SRU
Furieux des fortes amendes attribuées à leur ville pour non-respect de la loi SRU, les maires des deux communes ont déposé des recours gracieux.
La Frette-sur-Seine et Le Plessis-Bouchard font partie des plus mauvais élèves du Val-d’Oise en matière de logement sociaux. Sans surprise, le préfet du Val-d’Oise a pris un arrêté prononçant leur carence en matière de construction de logements sur la période 2014-2016. Encore plus lourdement sanctionnées d’un point de vue financier lors des trois prochaines années, les deux communes ont décidé de réagir en intentant des recours gracieux. En cas d’avis négatif, elles saisiront le tribunal administratif.
Avec 0 logement social construit sur les 158 qu’elle devait réaliser entre 2014-2016, la commune du Plessis-Bouchard n’a pas fait progresser son taux (6,97 % en 2016). La ville, qui payait déjà 120 000 € d’amende en 2017, verra sa sanction quadrupler. Une décision « injuste » selon le maire (LR), Gérard Lambert-Motte. « Cela représente 10 % de nos recettes fiscales », s’offusque l’édile qui se défend « de manquer de bonne volonté ». « Avant 1990, la ville ne comptait pas de logements sociaux. On est partis de zéro mais le retard ne se rattrape pas comme ça. » Pour plaider sa cause, Gérard Lambert-Motte a écrit au préfet « en lui expliquant que plusieurs centaines de logements étaient dans les tuyaux. » « Sur la future ZAC du Bois Servais, il y aura 171 logements sociaux sur les 400 prévus. Il y a aussi une opération à La Poste avec 70 logements et un autre au centre-ville avec 30 % de logements sociaux à chaque fois », énumère-t-il. « On nous prend de l’argent mais c’est paradoxal, car il faut investir pour accueillir de nouveaux habitants. »
« L’Etat ne tient pas compte de la faible superficie de la ville »
De son côté, avec 76 logements sociaux pour un taux évalué à 4 % en 2015, La Frette-sur-Seine est aussi loin du compte. « On devrait en avoir 480 sur les 1 700 que compte la ville, c’est impossible et inenvisageable », explique le maire (SE) Maurice Chevigny. L’amende annuelle de la ville a triplé en raison de sa carence sur l’objectif triennal 2014-2016 (construire 56 logements sociaux sur les 104 prévus). « On payait 58 000 € en 2017, ce sera 195 000 € en 2018. Ça réduit les marges de manœuvre sur un budget et en plus, la commune a perdu le droit d’attribution des logements », s’étrangle l’édile, très remonté contre le préfet. « L’Etat ne tient pas compte des efforts réalisés et des contraintes qu’on lui a maintes fois exposé : la faible superficie de la ville, l’espace boisé classé sur les coteaux, le plan de prévention des risques inondations sur les quais de Seine, la zone architectes des Bâtiments de France et les 17 ha inconstructibles sur les 202 que compte La Frette. »
Pour lui, l’Etat et l’établissement public foncier (EPF) d’Ile-de-France, qui détient un droit de préemption, porte aussi « la responsabilité » du non-accomplissement de l’objectif triennal 2014-2016. « Nous avions prévu de faire 200 logements avec une large part sociale sur l’avenue des Lilas. Ce dossier est au point mort à cause des restructurations qui ont eu lieu au sein de l’EPF », glisse Maurice Chevigny.
« Ne plus raisonner ville par ville »Sébastien Meurant, sénateur (LR)
Opposant de la première heure à la loi SRU, Sébastien Meurant (notre photo), sénateur (LR), n’a pas de mots assez durs contre « une loi idéologique d’inspiration communiste, dogmatique, inapplicable et qui ne tient pas compte de la diversité et de la particularité de nos territoires ». Et l’ancien maire de Saint-Leu-la-Forêt de prendre l’exemple de sa ville, elle-même carencée (13,65 % de logements sociaux) et pénalisée à hauteur de 436 000 € par an lors des trois prochaines années. « On n’a jamais autant construit depuis les années 1970 et pourtant on nous tape dessus. Il manque 900 logements sociaux à Saint-Leu, comment fait-on ? Est-ce qu’on peut faire du logement en trois ans ? La réponse est évidemment négative. Il faut trouver un terrain, les permis peuvent être attaqués, il y a des normes à respecter. Il y a même des sous-préfets qui disent à des maires de raser des pavillons pour créer du logement. »
Faire changer la loi
Le sénateur, partisan d’une « refonte totale de la politique du logement social », aimerait faire changer la loi. Avec Marc-Philippe Daubresse, ancien ministre du Logement et sénateur (LR) du Nord, il réfléchit à la possibilité de « raisonner sur le périmètre intercommunal et non plus ville par ville ». Il entend également « remettre le maire au cœur de la politique sociale du logement sur sa commune ». Enfin, il souhaiterait « reconsidérer la définition du logement social non plus en fonction de son financement public, mais en fonction des ressources des personnes qui l’habitent. Ainsi un logement du parc privé pourrait être mobilisé, en zone tendue, via des conventions à loyers maîtrisés. Cela suppose de requalifier le logement social en logement conventionné », explique Sébastien Meurant.
Les riverains disent « stop » aux constructions dans un même secteur
Dans la rue du Professeur-Calmette à La Frette-sur-Seine, des panneaux ont fleuri sur les portails des maisons depuis quelques semaines. « Stop à la multiplication des constructions », peut-on lire. Lundi, une trentaine d’habitants ont fait le déplacement en mairie, lors de la dernière permanence du commissaire-enquêteur, pour exprimer toutes leurs réticences sur le nouveau projet de construction d’une résidence intergénérationnelle de 97 logements sociaux au numéro 16 de la rue.
Déjà 43 logements sociaux en chantier dans la rue
« Il y a déjà un immeuble de 43 logements sociaux en construction dans la rue auquel nous ne sommes pas opposés, rappelle en préambule Samia Mouhouss, porte-parole de ce collectif de riverains. Nous ne sommes pas des égoïstes et nous sommes d’accord sur le fait qu’il faut des logements sociaux dans la ville. Mais pourquoi les concentrer dans un seul secteur ? »
Et les riverains de soulever les problèmes de circulation qu’engendrerait « l’arrivée de 400 nouveaux habitants » dans le quartier. « Devant l’école, aux heures de pointe, ça n’avance déjà pas », explique l’un d’eux. Mais aussi, « l’incapacité de l’école d’accueillir autant de nouveaux élèves ». « On paye des années d’inaction de la municipalité en termes de logements sociaux. On n’est pas opposés au projet mais il doit être revu à la baisse. » A.B.
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